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ÉNONCÉ DU CONSEIL DE SANTÉ DU BSEO : La restructuration en santé publique doit tenir compte des répercussions sur la communauté
2019-04-25
La restructuration en santé publique que propose le nouveau gouvernement de l’Ontario pourrait avoir des répercussions à court et à long termes sur la communauté locale, prévient le Conseil de santé du Bureau de santé de l’est de l’Ontario.
Cette annonce surprise du gouvernement, faite à la suite de la publication du budget provincial de 2019, donne un aperçu d’un plan pour « moderniser » la santé publique en diminuant le nombre d’unités de santé publique dans la province de 35 à 10 au cours des deux prochaines années. Le gouvernement annonce la coupure du financement provincial en santé publique en même temps qu’il modifie le modèle de partage des coûts des services avec les municipalités, en déchargeant par le fait même une proportion importante des coûts de la province aux gouvernements municipaux. Par le biais de la restructuration proposée, la province planifie de sabrer le budget de la santé publique de 200 $ millions—une réduction de presque 30 %. Cette coupure entre en vigueur immédiatement malgré le fait que les municipalités n’aient reçu aucun préavis et aient déjà planifié et entamé leurs dépenses budgétaires de l’exercice en cours.
Le Bureau de santé de l’est de l’Ontario (BSEO) et les chefs municipaux locaux sont inquiets de ces coupures financières dramatiques et des changements de la structure du secteur de la santé publique. « Ce que propose le gouvernement pourrait avoir de graves répercussions à plusieurs niveaux, en rendant plus difficile l’accès aux services de santé publique et en forçant les municipalités à étirer davantage leurs budgets déjà tendus et peut-être devoir augmenter les impôts fonciers, à un effet sur la santé et la sécurité des résidents locaux en bout de ligne », déclare Syd Gardiner, conseiller municipal de Cornwall et président intérimaire du Conseil de santé.
Dr Paul Roumeliotis, Médecin hygiéniste du BSEO, assure que la coupure des investissements en santé publique est contre-productive. Au contraire, l’investissement en santé publique en amont constitue une mesure cruciale qui peut diminuer en aval la « médecine de couloir » – un objectif clé du gouvernement Ford. « La santé publique ne représente qu’une petite fraction du budget global de la province en santé, mais livre un retour sur l’investissement très élevé », dit Dr Roumeliotis. « Des éléments probants illustrent que les programmes de santé publique améliorent la santé à long terme. En fin de compte, nos programmes font diminuer les coûts en permettant aux gens de rester en bonne santé et d’éviter les séjours à l’hôpital. »
Une préoccupation majeure du Dr Roumeliotis et de M. Gardiner est la possibilité que le transfert de la gouvernance des services en santé publique des comtés de l’Est à un secteur régional élargi fasse diminuer également la capacité du secteur de santé publique à aborder les défis et les difficultés propres aux comtés de l’Est. Notre région comporte des taux plus élevés de maladie chronique, de pauvreté, de familles monoparentales et de problèmes en santé mentale, ainsi que des niveaux plus faibles de préparation à l’école chez les enfants et un accès réduit aux soins de santé primaires.
Notre présence locale et nos liens étroits avec les partenaires communautaires et les résidents ont fait en sorte que le bureau de santé est bien placé pour répondre aux besoins locaux. Parmi ceux-ci on compte des services tels que les cliniques de soins buccodentaires pour les familles à faible revenu, les programmes de bien-être des nourrissons pour les familles qui n’ont pas de médecin de famille ni de pédiatre, et des services d’orthophonie pour les jeunes enfants. Le BSEO prend aussi en charge les flambées de maladies infectieuses locales (incluant récemment les suivis aux expositions à la rougeole), fournit des services d’inspection en santé et sécurité tant des dépôts d’aliments locaux, des garderies, que des établissements de soins de longue durée et de services personnels, ainsi qu’il offre du soutien en santé publique au Mohawk Council of Akwesasne. Étant donné la population francophone considérable dans les comtés de l’Est, le BSEO est l’un des rares bureaux de santé dans la province à offrir des services complètement bilingues.
À travailler directement au sein de la communauté, le bureau de santé peut se mobiliser rapidement dans la localité pour répondre à des menaces à la santé publique, incluant le déploiement accéléré des cliniques d’immunisation durant la pandémique de H1N1, la réponse d’urgence à la contamination potentielle de l’eau lors d’un incendie à St-Albert, le chavirement des bateaux remorqueurs dans le fleuve St-Laurent et la gestion d’urgence des récentes inondations menaçantes le long des secteurs riverains dans Prescott-Russell. Le BSEO a aussi coordonné les services de santé dispensés aux sinistrés des inondations de Kashechewan, ainsi qu’aux demandeurs d’asile venant des États-Unis.
Un plus grand modèle régionalisé peut nuire à la capacité du secteur de santé publique de répondre rapidement aux urgences et aux besoins de santé locaux. Les municipalités pourraient devoir payer plus pour un pouvoir dilué de prise de décision en matière de programmes et de prestation de services de santé publique. D’ailleurs, des préoccupations face à la prise en charge de façon adéquate des enjeux propres aux régions rurales font aussi surface. Par exemple, les résidents des régions rurales se fient davantage à la disponibilité de services locaux par opposition aux résidents des centres urbains qui bénéficient de transport en commun. Une approche régionalisée pourrait forcer les résidents des comtés de l’Est à se déplacer plus loin pour obtenir des services de santé publique.
Bien que Dr Roumeliotis favorise la modernisation de la prestation des services de santé pour réaliser de plus grandes économies, il est toutefois inquiet qu’une transformation aussi dramatique de la structure et du financement du secteur de la santé publique mette en danger des programmes cruciaux et risque la santé de la communauté. Il attire l’attention sur le fait que le BSEO ait déjà adopté une approche frugale en instaurant quelques coupures financières au cours des dernières années. « Ce fut une priorité pour le Bureau de santé de l’est de l’Ontario de trouver des économies dans ses opérations. Nous avons mis en œuvre des nouvelles technologies numériques et mobiles qui nous ont permis de réduire les coûts de nos opérations et notre infrastructure, et ce sans compromis à la qualité ou à la portée de nos services dans la communauté. De plus, nous avons déjà pris les moyens de travailler avec les bureaux de santé voisins pour explorer les moyens de réaliser des économies de taille et améliorer notre efficacité, sans pour autant nuire à l’uniformité et la constance des services. »
L’annonce de la restructuration du secteur de santé publique et des coupures budgétaires a été soudaine et n’a comporté que très peu de détails de la part du gouvernement provincial, créant une grande incertitude pour les unités de santé publique et les municipalités quant à l’implantation de ces changements. Bien qu’aucune consultation préalable n’ait eu lieu, ni publique ni auprès des intervenants, avant l’annonce des changements, le Conseil de santé du BSEO et les chefs municipaux espèrent toutefois qu’ils seront inclus dans les discussions futures avec le gouvernement. « L’impact sur nos collectivités sera très direct », déclare M. Gardiner, « il est donc important que nous ayons une place à la table pour se faire entendre. Nous souhaitons travailler ensemble avec le gouvernement pour trouver des solutions qui soutiennent les besoins communautaires au sein d’un système de santé durable. C’est bon pour tout le monde, parce que la santé des communautés est synonyme à la prospérité des communautés. »